Au cours du vieillissement, le système immunitaire s’affaiblit, ce qui concourt à un accroissement de la fragilité. Une étude parue en Mars 2020 dans Nature, présente une cartographie détaillée des cellules immunitaires situées au niveau intestinal ainsi que du microbiote. Le microbiote intestinal est un élément essentiel à l’organisme, notamment par son rôle dans la digestion, la régulation du système immunitaires et la prévention de pathologies. Cette étude de cartographie est intéressante pour étudier par la suite, dans le cadre du vieillissement, le microbiome des personnes fragiles et/ou âgées.

Ce travail du Wellcome Sanger Institute a été réalisé sur des échantillons de tissus muqueux frais du caecum, colon transverse, colon sigmoïde et des ganglions lymphatiques mésentériques, issus de donneurs adultes.

La composition microbienne a été analysée par séquençage de l’ARN 16S ribosomal, et a permis d’identifier des niches au contenu bactérien différent. Les chercheurs ont voulu déterminer si cette hétérogénéité microbienne observée était accompagnée d’une hétérogénéité de cellules immunitaires présentes. Les cellules immunitaires des différents prélèvements intestinaux ont été triées puis les gènes actifs de ces cellules ont été séquencés (scRNA-seq). Ils ont ainsi pu mettre en évidence l’activation spécifique de certains gènes dans différentes populations cellulaires de chaque niche.

Les cellules T auxiliaires migrent et adoptent des profils transcriptomiques différents selon les régions dans lesquelles elles se situent. Les lymphocytes Th1 et Th17 intestinaux migrent différemment et adoptent des différences au niveau transcriptionnel selon les facteurs extrinsèques aux cellules (environnement cellulaire). Les Th17 sont prédominants dans le caecum, tandis que les Th1 migrent préférentiellement dans le colon sigmoïde. Il semblerait donc que le microbiote intestinal interagisse avec les cellules immunitaires et modifie ainsi leur profil transcriptomique et leur migration.

Parmi les lymphocytes Treg, ceux-ci ont une activation continue au cours de leur migration  depuis les ganglions lymphatiques drainants puis le long de l’intestin, pour adopter ensuite un profil suppresseur en périphérie.

Les cellules de type B sont quant à elles plus abondantes et activées dans la partie distale du colon. Les cellules B synthétisant des IgA présentes au niveau du colon sigmoïde sont plus activées qu’au niveau du caecum. A ce niveau, les chercheurs retrouvent également une diversité bactérienne importante, ce qui contribue directement à une diversité clonale plus importante, un « homing» et une activation accrue des cellules B.

Ces analyses simultanées du microbiote intestinal et des cellules immunitaires voisines permettent de mettre en évidence l’importance des signaux environnementaux dans la mise en place et le maintien de l’immunité adaptative voisine. Ce travail ouvre la possibilité de réaliser une étude similaire chez les personnes âgées, ayant un microbiote intestinal différent, qui pourrait, en modifiant le milieu environnemental, avoir un impact sur l’état d’activation des cellules immunitaires voisines.

Ref : Kylie James et al. (2020) Distinct microbial and immune niches of the human colon. Nature Immunology. DOI: 10.1038/s41590-020-0602