Contexte: Issus des vagues migratoires des années 1960 et en provenance d’Afrique du nord et d’Afrique subsaharienne, des anciens travailleurs aujourd’hui pour la plupart à la retraite sont toujours logés dans des résidences sociales et sont communément appelé « chibanis». Ces derniers ont été dans la plupart des cas employés dans des métiers d’exécution mobilisant de la force musculaire, essentiellement dans le bâtiment. Compte-tenu du contexte socio-culturel particulier à ce groupe et de leur mode de vie, l’intérêt d’étudier un niveau de fragilité spécifique à ce groupe s’est imposé notamment face au peu de données disponibles dans la littérature médicale. Objectifs: Une investigation a été engagée à Marseille en 2020 dans l’objectif de repérer une potentielle fragilité spécifique à ces anciens travailleurs immigrés.
Méthodes: Une série de questionnaires individuels ayant trait à des données médico-sociales (caractéristiques démographiques, données cliniques, données anthropométriques…) ont été administrés en face à face auprès de volontaires résidant à Marseille et suivis par une association nationale « Banlieues Santé ». Les données recueillies ont donné lieu à un traitement statistique descriptif.
Résultats: Parmi la centaine de résidents suivis par l’association, 67 volontaires dont l’âge médian était de 77 ans, ont accepté de participer à l’étude. Du point de vue médical, la quasi-totalité d’entre eux (97,0%) présentaient au moins un indicateur médical de fragilité avéré tel que : un état de dénutrition (7,5%), une force de préhension anormale (55,2%), la présence de comorbidités (86,6%)… Concernant des aspects plus sociaux, pour ce qui est de la prise en charge médicale, plus d’un tiers relèvent de la Couverture Maladie Universelle (CMU) et une part significative ne possédaient pas de couverture complémentaire mutuelle (41,8%).
Conclusion: Cette première investigation montre la vulnérabilité médicale de cette population qui nécessite un repérage adapté d’une potentielle fragilité impliquant la mise en œuvre de parcours de santé spécifique. Toutefois l’adaptation de ces parcours de soins à envisager doit aussi prendre en compte leurs conditions de vie particulièrement délétères (précarité, isolement…) mais aussi leur propension à une certaine mobilité qui se manifeste par de long moment d’absence dû à un long séjour dans le pays d’origine
Réf : Jacques Chiaroni, Patrick Villani, Anne-Laure Couderc (Université, Aix-Marseille, Marseille, France), Année Gérontologique 2024